La Continuité Ultime

L’activité éveillée

Les trois activités secrètes de l’esprit, de la parole, du corps et l'activité compassionnée

L’activité secrète de l’esprit : l’exemple du joyau

262 Joyau exauçant tout désir
Achèvant, sans idéation,
Simultanément chacun et
Tous les souhaits de ceux qui sont
Dans la sphère de son influence,
Bouddha, exauçant tous les voeux,
Bien que la base depuis laquelle
Ceux nourrissant des conceptions
Distinctes ouïssent une variété
De doctrines, reste sans concepts.
262 Soit l’exemple d’un précieux joyaux exaucant les voeux. Il n’a pas d’idéation sous la forme d’une motivation mentale où il se dirait : « Je vais être généreux ! ». Cependant, il achève à la perfection, sans confusion et simultanément chacun tous les souhaits désirants, qu’ils soient tournés vers la nourriture, les vêtements, le grain, les médicaments, un abri, etc…les voeux variés des êtres ordinaires qui l’invoquent dans sa proche sphère d’influence .
Le parfait bouddha est un précieux joyau exauçant tous les voeux dans le même sens où, bien qu’il soit la base depuis laquelle, aussi, une multitude de disciples, aux conceptions distinctes inspirées des trois types de familles spirituelles [Śrāvaka, pratyeka6buddha6_8, mahayāna], ouïssent les doctrines variées des trois véhicules en harmonie avec leur propre aptitude karmique, en parachèvant parfaitement le sens; le bouddha lui-même, au moment où il enseigne ces doctrines, reste sans le moindre concept, n’a pas la moindre idée qu’il « va expliquer ».
263 C’est en permanence que le sage
S’applique, autant que durera
Le devenir, à faire le bien
Des autres sans effort à hauteur
De ce qu’ils sont, à l’instar du
Précieux joyaux qui dispense, large,
Sans y penser et sans effort
Les richesses qu’on a souhaitées.
263 En effet, de même, un précieux joyau cintāmani dispense largement à autrui, [ici] les quiddams qui l’ont invoqué, sans peine, sans effort, les biens, les richesses qu’ils ont souhaitées, quelqu’elles soient, sans pensée intentionnelle. A son instar le bouddha, puissant parmi les sages, s’applique en permanence, en un flot autant ininterrompu que durera le devenir, ce saḿsāra sans fin, à faire le bien des autres, les êtres qu’il lui faut guider en leur enseignant une doctrine propre à la mesure, à la hauteur de ce qu’ils sont, ceci sans peine et sans effort.
264 Il faut savoir que de même que
Les êtres qui cherchent ce beau joyau
Le trouvent rarement car il repose
En effet, sous la terre, la mer,
De même le Bien-allé est dur
A trouver pour les transmigrants
Dont l’âme est la proie de passions
D’une fortune karmique néfaste.
264 Il faut savoir que de même que les êtres de faible mérite, ceux qui cherchent, qui souhaitent avidement cet objet, trouvent rarement le beau, le précieux joyau qui accomplit tout ce que l’on souhaite, toutes les nécessités, car il repose en effet sous beaucoup de terre, car il est au sein d’une grande mer, de même l’apparition des deux corps du Bien-allé est ultimement dure à trouver pour toute l’infinité des êtres du saḿsāra, dont l’âme individuelle même est souillée parce qu’en proie aux passions [primaires,] secondaires dans des fortunes karmiques néfastes de divers types.

L’activité secrète de la parole : l’exemple de l’écho

265 Soit le son de l’écho. Produit
Par une cognition autre,
Sans intention, fabrication,
Il n’est ni externe ni interne.
Le Discours de l’Ainsi-Allé,
De même, est une production dans
Une cognition autre. Dénué
D’intention, de fabrication,
Il n’est ni externe ni interne.
265 Si [l’on prend un exemple] tel que le son d’un écho sur un rocher, etc. [il consiste en] l’apparition de sons variés. Cette apparition opère par la force de conditions : elle se manifeste, est produite uniquement dans la cognition personnelle de l’auditeur, qui est une [entité] autre [que cette falaise], en correspondance étroite avec sa propre émission sonore. La falaise est dénuée d’intention telle que : « Je vais émettre ce son. », intention qu’elle aurait fabriquée [mentalement] et à la réalisation de laquelle elle s’évertuerait. L’essence même du son [renvoyé] n’est ni externe ni interne à la falaise.
De même, le Discours de saint dharma des Ainsi-allés [est constitué de] l’apparition d’une variété de phonèmes. Cette apparition est dépendante [d’un contexte] de discipline spirituelle en ce sens que ces phonèmes n’apparaissent, ne sont produits que dans la cognition singulière d’un auditeur autre [que le bouddha] en correspondance étroite avec sa motivation (bsam pa) individuelle. Le bouddha n’a pas la moindre intention, ne fabrique pas mentalement une idéation du genre : « Je vais lui montrer cela et ceci », idéation à la concrétisation de laquelle il s’appliquerait. L’essence même des phonèmes [de son Discours] n’est ni interne ni externe aux corps du Bouddha.

L’activité secrète du corps : l’exemple du ciel

266 De même que certains voient le ciel
‒ Insoupçonnable, non manifeste,
Inobservable, ne portant rien,
Complètement en dehors du
Procès visuel, immatériel,
Inassignable‒ haut ou bas
Sans qu'il ait rien de tel, de même
Bouddha se voit sans rien de tel.
266 Le ciel n'a pas le soupçon d'une existence (grub pa) d'objet [efficient], ne se manifeste pas aux sens et la cognition ; il n'existe pas comme objet observable par ceux-ci, ni comme une base-support de ceux-ci ; il est en particulier complètement en dehors du procès de la faculté visuelle (mig gi dbang po'i lam>) , n'existe pas comme forme solide (litt.: faisant obstruction), n'est pas composé de caractéristiques qu'on puisse lui assigner, dans le champ visuel d'autrui en disant "le voilà !" Pourtant il en est certains pour le voir "haut" tel qu'il paraît au zénith, "bas" tel qu'il paraît à l'horizon, lui trouver différentes couleurs et formes même si cet espace s'il apparaît bien diversement, n'a pas dans l'absolu une telle existence réelle.
Dans le même sens, la force de l'aspiration des disciples leur fait voir le boudda à travers toute l'infinité d'émanations montrant les douze actes, etc.Cependant, le bouddha absolu, s'il semble apparaître diversement, naissant, cessant, etc., n'a pas une telle existence reélle, étant sans changement.

L’activité compassionnée : l’exemple de la terre

267 Les racines de vertus des êtres
Croissent en dépendance du parfait
Bouddha, terre sans concept, semblables
A toutes choses qui grandissent, se fixent
Trouvent leur espace en dépendance
D'une terre généreuse sans concept.
267 Si [l’on prend un exemple] tel que celui de la vaste terre, celle-ci génère tout, plantes, forêts et fleurs, sans effort, sans concept ‒"Engendrons ceux-là!"‒ et en dépendance d'elle grandissent de nouvelles [choses] d'abord absentes, se fixent préliminairement les racines, tout trouve progressivement son espace et s'étend, prenant soin de tout être vivant.
Semblablement, du parfait bouddha, comme une vaste terre, sans concept, sans un effort durant lequel celui-ci penserait :"Je vais faire le bien de ceux-ci", grandissent en dépendance de lui et sans exception toutes les récoltes des racines de vertus d'innombrables êtres, en dépendance de lui celles-ci se fixent et trouvent leur espace, prenant soin de la vie de l'infinité des êtres sensibles.
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